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L’Afrique, constamment sollicitée par l'Europe pour

             ses réserves de gaz

             L'appétit  soudain  des  Européens  pour  le  gaz
             africain  est,  à  première  vue,  une  opportunité
             pour développer de nouveaux gisements. Depuis
             plusieurs  mois,  les  dirigeants  européens
             multiplient  les  efforts  pour  doper  leurs
             importations.  Au  Sénégal,  où  le  champ  de
             Tortue  devrait  produire  2,5  millions  de  tonnes
             de gaz l'an prochain, l'Allemagne vient offrir un
             large soutien financier pour porter le volume à
             10 millions de tonnes, un surplus qui sera bien
             sûr  destiné  en  priorité  à  l'Allemagne.  L'Italie  a
             fait une campagne intense en Algérie, suivie par
             les  dirigeants  français.  Le  Nigeria  et  le  Maroc
             ont inauguré avec beaucoup d'enthousiasme un
             projet de gazoduc de 5 000 kilomètres destiné à
             desservir l'Europe. Au total, les multiples projets
             gaziers  du  continent,  même  s'ils  ne  sont  pas
             tous  financés,  s'élèvent  à  400  milliards  de
             dollars.
             Bien  que  ces  revenus  soient  les  bienvenus,  on
             peut  se  demander  si  c'est  vraiment  le  bon
             moment  pour  produire  plus  de  gaz  pour
             l'exportation alors que les besoins domestiques
             ne sont toujours pas satisfaits.                                           Gaz naturel,image d'illustration,
             Six cents millions d'Africains n'ont toujours pas
             accès à l'électricité. Il n'est pas certain que les  Le réchauffement climatique pourrait en outre bientôt ruiner
             nouveaux investissements leur profitent. Plus de  les  investissements  dans  les  hydrocarbures.  Certaines  ONG
             la  moitié  concernent  l'extraction,  et  non  la  africaines militent pour que les investissements dans le gaz
             distribution locale. Ils sont clairement destinés  soient affectés aux énergies renouvelables. Mais bien sûr, les
             aux  étrangers.  Une  autre  objection  des  ONG  Européens  et  les  organisations  pressés  d'investir  dans  des
             hostiles  à  ces  projets  est  que  les  retombées  projets  pour  l'Europe  n'ont  pas  l'intention  de  financer
             économiques  sont  peu  probables,  comme  le  l'énergie  solaire  ou  éolienne.  La  Banque  Européenne
             montre l'expérience des grands pays pétroliers  d'Investissement  va  à  l'encontre  de  la  volonté  des  Etats
             africains.  Au  Nigeria,  premier  producteur  de  européens.  Cette  décision  est  contestée  par  certains
             pétrole  du  continent  depuis  de  nombreuses  décideurs africains à la recherche de financements.
             années, quatre personnes sur dix vivent encore  On  peut  se  demander  pourquoi  la  Banque  Européenne
             sous  le  seuil  de  pauvreté.  Au  Mozambique,  un  d'Investissement  refuse  de  financer  en  Afrique  ce  qui  est
             pays  classé  parmi  les  plus  pauvres  du  monde,  autorisé  en  Europe.  L'Afrique  n'est  pas  le  principal
             Total  prévoit  d'investir  20  milliards  de  dollars  responsable  de  l'émission  de  gaz  à  effet  de  serre.  La
             pour  exploiter  le  gaz  offshore  :  un  montant  consommation  d'électricité  émettrice  de  carbone  d'un
             supérieur  au  PIB  du  pays.  Le  projet  est  Européen est 25 fois supérieure à celle d'un Africain, toutes
             actuellement  en  suspens  car,  au  lieu  de  sources  d'énergie  confondues.  Dans  un  rapport  sur  la
             favoriser le développement, il a surtout alimenté  manière de combler le déficit énergétique de l'Afrique, il est
             la résurgence du terrorisme islamiste. À terme,  souligné que les énergies renouvelables fournissent déjà 40
             le  gaz  sera  exporté  vers  l'Afrique  du  Sud  et  %  de  l'électricité.  Pourtant,  le  gaz  reste  essentiel  pour
             l'Europe et son exploitation va surtout accroître  l'industrialisation du continent, car les usines de ciment ou
             le  stress  financier  de  ce  pays  déjà  lourdement  d'acier requises pour construire les infrastructures sont très
             endetté.                                      fortement consommatrices d'énergie.

             Afrique                                                                                       26
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